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Réglage de l'avance d'une pompe d'injection Bosch VE

Pour le calage de la pompe d'injection Bosch VE équipant le VM, le 200 tdi et le 300 tdi, ainsi que de nombreux véhicules diesel indirects produits dans les années 80 et la première moitié des années 90, il est nécessaire de disposer d'une pige spéciale. Mais le réglage est facile une fois cet outil entre les mains.

Il ne s'agit en fait pas stricto sensu d'une pige, puisque cet accessoire n'est ni un étalon de mesure, ni un instrument servant à relever des longueurs, ni un outil servant à bloquer une pièce dans une position prédéterminée. Mais il évoque incontestablement les piges graduées qui servaient autrefois au calage de l'allumage des moteurs. C'est en réalité une simple rallonge  : un tube creux dans lequel coulisse une tige venant pousser le toucheau d'un comparateur.

Sommaire :

Principe de calage du point d'injection

Les images ci-dessous sont extraites de la documentation Bosch : "Diesel Distributor Fuel-Injection Pumps - Edition 94-95".

Cette pompe mise au point par Robert Bosch existe en différentes versions jusqu'à 6 cylindres, et est également produite sous licence par Zexel (filiale japonaise de Bosch spécialisée dans le diesel), et par Denso. Ses derniers avatars ont été équipés d'une gestion électronique (sur 300 tdi uniquement chez Land Rover).


Vue en coupe d'une pompe Bosch VE

Le fonctionnement est assez simple : à gauche sur le schéma ci-dessous se trouve la pompe basse pression (pompe à palettes). Une deuxième pompe, haute pression celle-là, est actionnée par des cames, et envoie le gazole vers l'injecteur concerné à travers un distributeur rotatif. Le principe de fonctionnement de la partie inférieure de cette pompe est donc d'une simplicité enfantine. Il n'en est malheureusement pas de même pour la partie supérieure, en particulier sur les versions destinées aux moteurs suralimentés.


Schéma du distributeur


Vue en coupe du distributeur rotatif

On remarque, dans l'axe du plongeur, et à droite sur la photo, entre les sorties du distributeur, un long bouchon fileté (M8, au pas de 100). C'est là que vient se placer l'instrument de mesure. Il sert à relever le déplacement du plongeur pour un angle de rotation donné du vilebrequin et donc de la pompe. La pompe, comme l'arbre à cames, tourne à la moitié de la vitesse du vilebrequin

La partie haute pression de la pompe est constituée d'un piston actionné par des cames.


Le plongeur et ses cames de commande


Pompe haute pression et distributeur rotatif

Au passage, Bosch indique que la puissance maximum qui peut être obtenue avec son système VE est de 25 KW par cylindre. Ceci nous donne 33.5 Ch. par cylindre. Pour un 4 cylindres, la puissance maximum possible avec cette pompe, quelle que soit la cylindrée, est donc de 134 Ch. Ceci est lié à la quantité maximum de gazole (déterminée par la pompe), à son énergie massique, et au rendement énergétique du moteur diesel moyen (le manuel Bosch ne donne aucune information sur les conditions de mesure de cette puissance unitaire).

La loi de Shelby qui veut que le meilleur moyen d'augmenter la puissance d'un moteur soit d'en augmenter la cylindrée reste cependant valable pour un diesel à pompe VE... à condition d'en augmenter le nombre de cylindres. Mais cette loi remontant à la conception des Cobra et autres GT40 ne s'encombrait pas vraiment de la notion de rendement, malgré les culasses Hemi. Cette loi est un raccourci puisqu'il n'y est pas question de rapport volumétrique. Or, le rendement lui est directement proportionnel, et le turbocompresseur un moyen simple, efficace et énergétiquement très rentable pour l'augmenter à haut régime, là où on a besoin de puissance, tout en préservant le couple aux régimes "atmosphériques".

On ne m'empêchera pas d'être sceptique face à de prétendus 2.5 litres 4 cylindres diesel à injection VE atteignant ou dépassant les 160 chevaux... à moins de modifications internes sévères de la pompe permettant d'en augmenter le débit maximum.

Un VM 2.5 litres de Range Rover, vendu pour environ 120 Ch dans sa configuration d'origine, est très proche de cette limite. 10 à 15 % d'augmentation de la pression de suralimentation se traduisant au plus par 10 à 15 % de rendement supplémentaire (en première approximation) ; donc en poussant la pompe au maximum il y a de quoi gagner une puissance significative. Mais il ne faut pas rêver. Aux régimes concernés et à pleine charge, la combustion durera tellement longtemps qu'elle se finira dans l'échappement avec toutes les conséquences néfastes que l'on connaît. D'où l'indispensable pyromètre qu'utilisent les vrais connaisseurs pour gérer intelligemment leur moteur gonflé.

L'adaptateur original Bosch


Dessin représentant l'adaptateur d'origine Bosch

La vie réserve parfois des surprises... Un jour, en discutant avec un professionnel de la maintenance industrielle, j'évoque les pompes VE, et lui demande en plaisantant si par hasard il n'aurait pas les cotes de ce support spécial. Et là il me montre sa poche avec un sourire amusé. Puis il en sort son portefeuille et en extrait le schéma ci-dessous. Il allait justement en tourner un pour l'un de ses amis !

Le schéma est livré - avec son accord - tel quel, sans aucun engagement quant à l'exactitude des cotes. Il s'agit bien d'un relevé sur l'outil original, contrairement à ce que j'avais écrit ici autrefois. Erreur corrigée.


Schéma coté de l'adaptateur d'origine Bosch

Comme le montre le dessin ci-dessus, il s'agit d'un cylindre creux dans lequel coulisse une tige. Il est muni, à gauche, d'un filetage venant se visser à l'arrière de la pompe dans l'axe du plongeur haute pression, et recevant le comparateur à l'autre extrémité. Le comparateur est fixé en place grâce à une pince serrée par un écrou moleté (à l'extrême droite).

L'usinage d'un tel outil n'est pas difficile en soi, si l'on maîtrise le filetage et le moletage. Mais ce sont justement des opérations délicates pour un débutant. Heureusement, il est possible de simplifier cet accessoire, ce dont ne se privent d'ailleurs pas les fabricants d'outillage adaptable (de ping-pong).

Un adaptateur simplifié

L'accessoire ci-dessous est un bricolage facile à réaliser en quelques dizaines de minutes, même sur un petit tour de modéliste. Et pour un professionnel, c'est de la rigolade.

Ce travail est le tout premier outil "un peu évolué" réalisé sur mon tour. Je demanderai donc au lecteur d'être indulgent quant à la qualité de réalisation. Il fonctionne cependant parfaitement.


Adaptateur maison

On distingue un tube, fileté à l'extrémité gauche. A l'intérieur coulisse une tige qui vient pousser sur le comparateur. Une vis papillon permet de bloquer en place le comparateur. Un écrou a été placé en force (cf. infra) - j'aime bien les locutions latines cryptoarchéobranchouillesques en italiques - pour permettre le serrage avec les doigts, et faciliter les perçages et taraudages destinés à la vis de blocage du comparateur. Les six faces offertes permettent de se passer de diviseur pour effectuer proprement les trois perçages et taraudages. En effet, il faut pouvoir placer la vis de serrage du comparateur sans se contorsionner une fois l'adaptateur en place au cul de la pompe.


Les éléments constitutifs de l'adaptateur

La tige intérieure est une glissière prélevée sur une vieille imprimante à jet d'encre (voir Récupération informatique / électronique). Elle fait 5 mm de diamètre, et a été raccourcie à 83 mm. L'écrou est un M14, et le filet a été éliminé par perçage à 14 mm. L'extrémité droite de l'adaptateur a été tourné pour que l'écrou évidé y entre en force ; il a été placé à la presse, et assuré par de la Loctite 648 "Blocpresse". Il est plus facile de faire cette bidouille, que de trouver un jet de section hexagonale.


Les cotes...

L'ensemble est taillé dans un barreau d'acier de 15 mm de diamètre, alésé à 5 mm sur toute sa longueur. L'extrémité recevant le comparateur est réalésée à 8 mm sur 22 mm de profondeur.

  1. M8, pas de 100, 6 mm de longueur
  2. diamètre 7 mm sur 10 mm de longueur
  3. diamètre 12 mm sur 70 mm de longueur (pour ne pas frotter sur les canalisations haute pression)
  4. diamètre 15 mm sur 10 mm de longueur
  5. diamètre 14 mm sur 11 mm de longueur

Il reste, une fois l'écrou solidarisé, à réaliser trois taraudages M5, et à trouver une vis papillon (ou autre) M5 également et de quelques centimètres de longueur.

Réglage de l'avance

Le modus operandi est assez proche de celui de l'allumage d'un moteur à essence grâce à un comparateur placé dans le puits de bougie ! On n'est donc absolument pas en terrain inconnu. (en partant du principe qu'avant de bidouiller du diesel, on a tout de même un minimum d'expérience de l'essence, au moins en deux temps - une vielle mob' avec sa pige de réglage d'allumage). En résumé, si on sait régler une mob' à la pige, ou si on a vu faire le marchand de cycles du coin, on sait régler un diesel à injection Bosch VE. C'est "presque" pareil !


L'adaptateur et le comparateur sont fixés au cul de la pompe, après dépose du bouchon

En principe, il doit y avoir un repère de PMH (point mort haut) ou TDC (top dead center) quelque part sur la poulie. Sur un diesel indirect, il faut espérer qu'il y soit, car sa détermination imposerait la dépose de la culasse ! En effet, il est a priori impossible de passer une pige par le puits d'injecteur ou de bougie de préchauffage. J'ai effectué cette vérification sur mon VM. Verdict : le repère est parfait.

Pour la vérification ou détermination du PMH, deux méthodes simples sont décrites ici. La plus rapide exige un comparateur, mais la plus précise ne nécessite qu'un simple mètre à ruban.

Ensuite, le constructeur du moteur donne une valeur de déplacement du plongeur haute pression pour un certain angle avant PMH. C'est le point de référence de l'avance à l'injection. Le plus facile pour déterminer sa position n'est pas d'utiliser le secteur gradué, mais un morceau de papier adhésif et un mètre à ruban. Il suffit de mesurer le périmètre de la poulie, et de diviser par 360. On obtient alors une relation millimètres / degré d'angle. Un morceau de scotch, un crayon et le tour est joué. Les repères (ici à 3° et 25°) sont tracés à droite du repère PMH.

Un fil de fer fixé à proximité sert d'index.

Attention : si on compare à ce qui est écrit et illustré dans le manuel d'atelier, tout est inversé. En effet, le secteur gradué fixé sur le moteur est remplacé par un secteur gradué solidaire du vilebrequin !


Création des repères utiles
Les repères de PMH d'origine sont cerclés en rouge

L'accès aux trois vis immobilisant la pompe sur le bloc est restreint. Une clé à cliquet 1/4" (série radio) et une ou plusieurs longues rallonges sont nécessaires.


Accès difficile aux écrous de la pompe à injection

Le mécanisme de compensation d'avance à froid doit être libre.

L'exemple décrit ci-dessous est le VM du Range Rover.

Sur le VM, la levée est de 0.5 mm pour une rotation de vilebrequin partant de 25° avant PMH pour arriver à 3° avant PMH. Elle doit être vérifiée comme étant comprise entre 0.16 et 0.18 mm au PMH.

On fait tourner le moteur à l'envers (ici dans le sens inverse des aiguilles d'une montre) jusqu'à dépasser largement le repère -25°. Puis le vilebrequin est tourné dans le sens des aiguilles d'une montre : les jeux sont rattrapés, et on s'arrête au repère -25°. Le comparateur est mis à zéro, puis le vilebrequin est à nouveau tourné jusqu'au repère -3°. La pompe, préalablement légèrement desserrée, est tournée pour obtenir une lecture de 0.5 mm. On resserre les fixations, et on contrôle au PMH : on doit lire 0.16 à 0.18 mm. Une vérification en repartant de -25° est indispensable. Règle de base : toujours mesurer au moins deux fois.

S'il s'avère impossible d'obtenir ces valeurs, c'est que les repères sont faux, ou encore que le calage de la cascade de pignons est incorrect. Au pire, la pompe a un gros problème.


(Ne pas tenir compte de la valeur affichée sur cette photo !)

Il est bon de savoir que ces valeurs sont celles d'un réglage en usine, sur un moteur neuf. En fonction de son usure et / ou de son fonctionnement, il est habituel d'avoir besoin de le retoucher pour obtenir un fonctionnement optimal.

A oui, j'oubliais : penser à replacer le bouchon avec son joint sous peine d'arroser le compartiment moteur au premier coup de démarreur...


© jft / www.cambouis.com / tous droits réservés
page ajoutée le 18 mars 2007
dernière révision le 8 novembre 2007